Oh ! Le cèdre ! Si les premiers humains
Avaient fait vu de la subsistance parfaite
Assouvissant leur soif de matière et de beauté,
Un dieu indulgent n'aurait pu concéder
Rien de mieux.
Arbre magnifique,
Qui d'un socle majestueusement évasé
S'affine soudain en un tronc droit et haut
Habillé d'une écorce rouge et brune
Comme d'un précieux manteau de très douce fourrure,
En rameaux gracieusement dispersés,
Et en bouquets soyeux d'aiguillons gris-vert.
Cèdres parfois énormes,
Mûris lentement depuis cinq siècles
Élancés sur leurs lourdes bases.
Le bois est tendre
Mais superbement ferme
Et, chez les meilleurs,
Si droit dans son grain
Qu'il se fend franc et net
En planches de cent métres
De long sur un de large
Épaisses comme des dalles
Sans le moindre nud.
Contre son grain
La coupe est nette et précise,
Il pèse peu
Et sa couleur est belle,
Brun-roux à l'origine,
Gris argenté plus tard.
[...]
Soumis à la vapeur
Il se courbe sans cassure.
On en fait des maisons, des bateaux,
Des coffres et des ustensiles de cuisine.
On tisse des tapis de son écorce
Et même des vêtements.
Avec quelques morceaux
De pierre aiguisée et de corne,
Avec quelques dents de castor
Et beaucoup de temps,
Finalement avec un peu de fer,
On peut bâtir avec le cèdre
Les dehors visibles
De l'une des plus grandes cultures du monde.
Seuls quelques mâts
Sont encore debout,
Ou plus souvent couchés
Dans les forêts moites et luxuriantes.
Comme les arbres déracinés
Ils gisent à côté,
Nourissant de leur sang
Les plus jeunes pousses
Qui s'échappent de leurs troncs.
Dans une scène infiniment adoucie
Par un admirable ensevelissement de mousse
Et de silence
Ils retournent à la forêt
Dont ils sont nés.
Extrait de Out of the Silence (Les voix du silence), par Bill Reid (1971),
traduit par Martine Reid
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