Prunier, (Jardinage.) (Page 13:529)

Prunier, prunus, (Jardinage.) arbre de moyenne grandeur, qui se trouve dans les pays tempérés de l'Europe, de l'Asie & de l'Amérique septentrionale. Sa tige est courte & rarement droite; la tête en est assez considérable pour la stature de l'arbre, mais irrégulierement disposée. Son écorce est inégale par les gersures qui s'y font de bonne heure. Ses feuilles sont dentelées, presque ovales & d'une verdure desagréable, parce qu'elles sont souvent gâtées par les intempéries du printems, & sur - tout par les insectes. Ses fleurs qui sont blanches & disposées en rose, paroissent au mois d'Avril. Les prunes qui succedent different pour la grosseur, la forme, la couleur & le goût, selon les diverses especes de prunier qui les produisent. Ces fruits renferment un noyau qui contient une amande amere.

Le prunier est le plus commun des arbres fruitiers à noyau. Son fruit n'est pas plus de garde que celui des autres arbres à noyau; il faut le manger dans le tems de sa maturité, à moins qu'on ne le fasse cuire ou sécher. Le prunier ne prospere qu'autant qu'il est dans une terre cultivée; il languit dans un sol inculte, & dépérit bientôt. Il vient à toutes les expositions, il se plaît dans une terre plus séche qu'humide, plûtôt sablonneuse que forte, mais particulierement dans le sable noir. Cependant on peut dire qu'il ne craint pas l'humidité, pourvu qu'elle ne soit pas permanente. En général il s'accommode assez bien de toutes sortes de terreins, pourvu qu'ils soient en culture, parce que ses racines tracent entre deux terres. Mais il craint la glaise; il n'y fait nuls progrès, & son fruit n'y vaut rien. Quant aux terreins absolument secs & légers, sablonneux & trop superficiels, le prunier ne s'y soutient que foiblement & n'y donne que des fruits maigres, verreux & mal conditionnés, dont la plûpart tombent avant leur maturité. Dans la glaise au contraire & dans les terres grasses & sortes, ils ne sont pas si sujets à tomber, ni à être verreux: mais ils pechent par le goût.

On peut multiplier le prunier de semence & par la greffe. On ne se sert du premier moyen que pour avoir des sujets propres à greffer. Il n'y a que quelques especes de prunes d'une qualité médiocre dont les noyaux produisent la même sorte de fruit; mais les noyaux du plus grand nombre d'especes ne donnent que des plants bâtards & dégénérés; & c'est un hasard quand il s'en trouve quelques - uns de bonne qualité. Il est donc d'usage de greffer le prunier, pour avoir sûrement l'espece de prune que l'on desire, avec d'autant plus de raison que la greffe donne encore de la perfection au fruit. Les meilleurs sujets pour greffer le prunier sont la cerisette & le saint - Julien. On se sert de la greffe en fente ou en écusson, mais la premiere réussit mieux, & fait des progrès plus rapides. Les sujets qu'on vient de désigner conviennent pour toutes sortes de terreins, à moins qu'ils ne soient trop secs, trop légers, ou trop sablonneux. Dans ce cas, il faut y mettre des pruniers greffés sur l'amandier, qui n'a pas l'inconvénient de pousser des rejettons sur ses racines, ce qui est à charge & fort desagréable: mais cette greffe réussit rarement. L'amandier a un défaut, il reprend difficilement, sur - tout lorsqu'il a été transporté de loin. On peut aussi greffer le prunier sur des pêchers & des abricotiers venus de noyau: il est vrai que les arbres qui en viennent étant délicats, demandent quelques ménagemens, & ils ne sont pas de durée. Voyez le mot Pépiniere.

Le prunier peut servir de sujet pour greffer le pêcher, l'abricottier, l'amandier ordinaire qui manque souvent, & l'amandier nain à fleur double, qui y réussit très - aisément. On vient à bout aussi de greffer le mahaleb, l'arbre de sainte - Lucie, le laurier - cerise, &c. sur le prunier; mais les suites n'en sont pas heureuses: la greffe & le sujet tout périt dans l'hiver qui suit.

Les pruniers que l'on tire de la pépiniere pour les planter à demeure, doivent être greffés de deux ans. Si on ne peut les avoir de cet âge, il vaut mieux les prendre d'un an que de trois; ces derniers réussissent moins sûrement que les autres. Cet arbre peut paroître dans les jardins sous différentes formes; d'abord à haute tige, qui est la figure qu'on lui donne communément; ensuite en espalier, où le plus grand nombre des especes de prunes réussissent mieux qu'à haute tige; enfin la forme du buisson convient à toutes les especes. La distance qui convient à ces arbres est de douze à quinze piés pour ceux à haute tige en plein air, dix où douze pour ceux en espalier, & quinze à dix - huit aux pruniers que l'on destine à faire le buisson; attendu qu'ils poussent vigoureusement, & qu'ils s'étendent plus sous cette forme que s'ils étoient à haute tige. C'est sur la qualité du terrein & sur sa profondeur qu'il faut déterminer le plus ou le moins de ces distances.

Le prunier fait de bonnes & fortes racines bien ramifiées;

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ce qui est cause qu'il reprend aisément à la transplantation. Cet arbre est si robuste & si familier dans le climat de ce royaume qu'il vaut mieux le transplanter en automne. La reprise en est plus assûrée que quand on attend le printems, & il pousse plus vigoureusement dès la premiere année: ce qui est très - avantageux pour disposer les jeunes arbres à prendre la forme qu'on veut leur donner.

De tous les arbres à noyau, le prunier est celui qui supporte le plus aisément la taille. Tout le ménagement qu'on doit y apporter, c'est de ne pas trop forcer la taille. Car plus on lui retranche de bois, plus il pousse de branches gourmandes jusqu'à s'épuiser entierement; & alors la gomme venant à fluer, l'arbre périt entierement. Le principal soin qu'on y doit donner, c'est de détacher la gomme & la mousse, d'enlever les chancres & le bois mort, de supprimer les branches chiffonnes & celles de faux bois, & de ne retrancher absolument que ce qui est nuisible.

Outre l'usage que l'on fait des prunes de la meilleure qualité pour la table, dans le tems de leur maturité, les autres servent à faire des confitures: mais en faisant sécher les bonnes prunes, on en fait d'excellens pruneaux; les plus grosses, les plus douces & les plus charnues sont les plus propres à remplir cet objet. La prune de damas & la gomme du prunier sont de quelque usage en Médecine.

Le bois du prunier est assez dur & marqué de veines rouges; c'est le plus beau des bois qui croissent dans ce royaume; ce qui lui a fait donner le nom de bois satiné. Cependant on en fait peu d'usage, parce que les bois que l'on tire d'Amérique sont infiniment supérieurs à tous égards; il est très - propre à différens usages des Tourneurs, des Tablettiers, & des Ebénistes. On peut donner à ce bois une belle couleur rouge, en le faisant bouillir dans de la lessive ou dans l'eau de chaux.

Nos auteurs d'agriculture font mention de plus de deux cent cinquante variétés de prunes, dont celles qui passent pour les meilleures sont au nombre de quinze ou seize, & on en compte vingt de celles qui peuvent passer pour médiocres; parmi les autres, il peut y en avoir une douzaine qui sont bonnes à faire des compotes ou des confitures: on fait peu de cas de tout le reste. La nature de cet ouvrage ne permet pas d'entrer dans le détail des qualités particulieres de ces différens fruits. Voyez à ce sujet les catalogues des RR. PP. Chartreux de Paris & de M. l'abbé Nolin.

Il y a quelques especes de pruniers qui peuvent intéresser les curieux par leur singularité ou leur agrément; comme le prunier à fleur double, dont la prune est excellente, & ses feuilles sont très - grandes; le prunier de perdrigeon panaché, dont le bois, la feuille & le fruit sont panachés; la prune sans noyau, qui renferme une amande sans nulle coquille osseuse; le damas melonné d'Angleterre, dont les feuilles sont bordées de blanc; & le prunier de Canada, dont la fleur un peu rougeâtre en - dehors est d'une belle apparence au printems.

Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, par une Société de Gens de lettres (1751-1772)
Publié sous la direction de Diderot et d'Alembert
Scanné et mis au format électronique par l'Université de Chicago

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